Nous le savons désormais (lien vers le premier article ici): le post-partum, cette période si particulière dans la vie d'une femme, peut s'avérer difficile pour beaucoup d'entre nous. Cela n'est pas sans fruits et sans grâces, mais le bouleversement rencontré, conjugué à une grande fatigue et à des modifications corporelles accrues, donne parfois le sentiment de marcher sur un fil. Quels sont les enjeux de cette période ? Nous avons vu comment aider une femme en post-partum. Mais comment s'aider soi-même lorsque l'on s'apprête à vivre ces semaines post-accouchement ?
Les enjeux du post-partum.
Le premier enjeu est bien évidemment celui de notre santé. Sur le plan physique, notre corps, s'est ouvert à son maximum pour laisser passer un bébé, il est donc normal qu'il en soit un peu déboussolé. Cela n'est pas une fatalité. Donner la vie est un acte magnifique et puissant, qui reflète sans aucun doute la force de Dieu. La femme a tout ce qu'il faut en elle pour enfanter. Cependant, les inconforts se soulagent, et les douleurs possèdent des remèdes. Lorsqu'un grand sportif sort de compétition, il se repose, se fait dorloter, soigner, jusqu'à ce que son corps retrouve un fonctionnement normal. Traverser cette période délicate comme les femmes le font depuis la nuit des temps est donc une affaire d'acceptation et de soin. Le premier combat est d'écouter notre corps afin de lui donner ce qu'il y a de meilleur.
Sur le plan psychologique, nous l'avons vu également: la chute hormonale est si forte qu'elle provoque, dans les jours qui suivent la naissance, le baby-blues, ces quelques jours un peu compliqués, teintés de tristesse, de doute ou de fatigue. Lorsque ce mal-être s'éternise, il ne faut pas rester seule, mais se faire aider. D'un processus naturel et physiologique, le baby-blues, on passe à une anomalie qui se soigne, la dépression. Ceci n'est pas une fatalité non plus: la société ne facilite pas la tâche aux jeunes mamans. De plus, le travail que l'on peut faire sur soi à cette occasion ne peut être que bénéfique pour nous, pour notre petit bébé, pour notre couple, ou nos proches. Traverser l'épreuve est bien plus efficace que de se voiler la face.
A priori donc, pour soigner tout cela, nous disposons d'une armada de médecins, sage-femmes, psychologues, psychiatres et thérapeutes en tout genre. Il nous suffit de trouver le bon, celui ou celle en qui nous avons confiance, et de nous laisser faire.
Mais il est un enjeu pour la femme chrétienne qui ne présente aucun symptôme. Un enjeu vital. Un enjeu qui refera surface dans l'éducation et dans le couple. Cet enjeu, c'est celui du combat pour l'humilité. De quoi parle-t-on ici ? Rien de plus simple. L'être humain, face à une épreuve, peut réagir de différentes manières. Spirituellement, il peut décider de sortir de son pétrin seul, à la force de son poignet. C'est l'apanage de l'orgueil, qui nous fait croire que nous nous suffisons à nous-même. Cet étau se resserre autour de nous, et nous nous illusionnons: n'ayant eu besoin de personne, le moindre mérite nous revient. Ce fut exactement ce que proposa le tentateur à Eve, au pied de l'arbre: être indépendante, réussir seule, sans Dieu. Cela l'a séduite. De là vient la faiblesse féminine de vouloir se débrouiller seule, de se comparer aux autres, et de sombrer dans l'isolement.
Une seconde option de réaction face à l'épreuve est celle, au contraire, de l'aveu de notre incapacité à faire face seule. Accepter de se voir dépassée, sentir la barque vaciller, et crier vers Dieu notre désespoir. Les psaumes regorgent de ce genre de prière, la créature rendant grâce d'avoir vu sa faiblesse, et d'avoir compris que seul Dieu pourrait la relever.
Pourquoi cet enjeu est-il si important ? Parce que choisir la route de l'orgueil va finalement nous faire perdre la maîtrise de tout. Paradoxalement, c'est l'orgueil qui dicte notre conduite, pas nous. Croire que nous nous suffisons à nous-mêmes est donc illusoire. Les écueils sont nombreux et découlent directement du péché originel. Au lieu de s'entraider, de s'écouter et de s'aimer, les femmes se jugent et se comparent. En revanche, reconnaître sa faiblesse nous mènera sur des routes insoupçonnées. En allant à Dieu, nous irons à l'autre. Et quoi de plus beau, au cours du post-partum, qu'une communion entre les femmes, elles qui ont en commun cette capacité de donner la vie ?
Avancer à l'école de l'humilité.
Le besoin de la jeune accouchée d'être aimée est immense, aussi grand que son besoin d'aimer. Mais ce chemin part bel et bien d'elle-même: on n'aide pas une femme qui n'a pas demandé d'aide. Il faut donc, chère future maman, que tu apprennes à te connaître et à identifier tes besoin. Pour ceci, deux pistes d'exploration à méditer.
Connaître son tempérament. On distingue, depuis l'Antiquité, quatre tempéraments : sanguin, mélancolique, bilieux et flegmatique. Détailler chaque tempérament serait extrêmement long. Ce qu’il faut retenir, c’est que nous avons souvent un tempérament dominant, mais nous ne sommes pas catégorisables dans tel ou tel caractère (plutôt rassurant, non ?). On parle d’un tempérament en définissant ce qui constitue la motivation de la personne dans la vie. Plaisir, amour de la vérité, réussite, paix… Qui est quoi ? Comment cela se verra-t-il pendant le post-partum ?
- La femme au tempérament sanguin a pour moteur le plaisir : ce qui la caractérise, c’est sa bonne humeur contagieuse, ses multiples projets, son humour, et son énergie légèrement volubile qui le rend parfois peu fiable ou pénible à supporter. Une femme sanguine aura une grande propension à voir le positif de chaque situation, ce qui peut s’avérer être une force lors du post-partum.
- La femme au tempérament mélancolique a pour moteur l’amour de la vérité et de la beauté : assoiffée d’idéal, elle est plutôt solitaire et, souvent déçue par ce qu’elle voit ici-bas, peut croire que sa vie est terrible. Cela constitue un terrain favorable aux « downs » du baby-blues : la dépression post-partum surviendra plus facilement chez une femme mélancolique.
- La femme au tempérament bilieux a pour moteur la réussite. Très énergique, elle laisse peu de place à la sentimentalité et avance. Elle sera très exposée à la tentation de l’orgueil en post-partum, car elle aime trouver des solutions par elle-même et ne supporte pas l’échec… Ses forces sont sa grande inventivité, sa combativité à toute heure, et une énergie presque sans bornes : attention à s’écouter !
- La femme au tempérament flegmatique a pour moteur la paix. Détestant les conflits, elle aime son confort et ses habitudes. La vie avec un nouveau-né ne lui fera pas forcément peur, puisqu’elle prendra les choses comme elles viennent. La fatigue peut s’avérer difficile à supporter pour elle, qui a tant besoin de sécurité intérieure et qui aspire au repos…
Ceci n’est qu’une ébauche bien grossière du tableau de la connaissance de soi. Il existe de nombreux livres et conférences, ainsi que des tests, qui détaillent chaque tempérament, ses forces, ses faiblesses, comment vivre avec, etc… à vous d’explorer ces connaissances précieuses pour vous connaître mieux.
Ressources à consulter: les conférences de l'abbé Brucciani, à écouter sans se lasser (www.chire.fr)
Se renseigner. On ne s’improvise pas marathonien. Oui, notre corps est fait pour donner la vie, et c’est magnifique. Mais ignorer volontairement ce qui s’y passe, c’est presque nier la puissance de ce corps. Aussi, renseignez-vous. Auprès de vos proches : mère, amies, qui sont passées par l’accouchement et le post-partum, et se souviennent. Elles vous parleront de ce qu’elles ont vécu (ce qui ne constitue pas la norme, bien sûr). Demandez-leur de le faire avec humour, afin de dédramatiser ce qui ne dure qu’un temps. Qu’il s’agisse des maux physiques post-accouchement ou de baby-blues, c’est toujours l’idée qu’on s’en fait qui donne le ton. Aussi, se renseigner sur le sujet n’est pas un manque de confiance. Lorsque vous partez en voiture pour un long trajet, vous regardez votre parcours sur une carte, ou un GPS. Lorsque vous êtes au musée, vous ne passez pas devant les œuvres évasivement, mais vous vous arrêtez, détaillez les couleurs, les nuances… Faites pareil avec le post-partum, n’ayez pas peur de la vérité, de ces nuances justement. Vous n’en serez que plus aguerrie le moment venu. Une fois vos proches consultées, allez à la pêche aux informations auprès de ceux qui vous suivent : votre sage-femme, votre médecin… Ils pourront vous donner des indications précises sur les maux mais aussi sur les remèdes. Ainsi, tétanisée à l’idée d’une épisiotomie, j’ai formulé ma peur à ma sage-femme, qui a pris le temps de m’expliquer ce geste, son pourquoi, et j’ai ainsi « dédramatisé » cet acte qui me paraissait atroce. Par la suite, j’ai bénéficié de nombreux petits conseils pour soulager la déchirure, ou une montée de lait trop douloureuse, ou un transit qui fonctionne mal…
Ainsi armée, en connaissant votre tempérament, en sachant que vous avez tendance à réagir de telle ou telle manière en situation de fatigue, vous saurez où et comment chercher de l’aide. En vous étant renseignée sur le post-partum, par des livres, des podcasts, ou simplement des discussions, vous saurez comment anticiper sereinement certaines choses, et vous sentirez où peut se trouver « la faille » pour vous. En identifiant vos besoins, vous serez plus à même de demander humblement de l’aide…
Quelques conseils pratiques sur ce chemin de l'humilité en post-partum ou comment anticiper matériellement cette période ?
Deux maximes à se répéter souvent. Oui, nous rêvons toutes du post-partum idéal, lisse et sans contraintes. Nous avons nos idées et nos projections sur la question. La dérive finale est la plus vicieuse: c'est celle qui nous fait perdre pied lorsque les choses ne se déroulent pas comme prévu. Voici deux phrases pour rester humbles et confiantes dans notre apprentissage de l'humilité:
"Rien ne sera jamais parfait."
"Je suis la meilleure maman pour mon bébé."
Deux interprétations possibles, toutes deux majeures à mon goût.
Premièrement, ne vous attendez pas à ce que l'on vous devine. L'homme aidant l'homme, il l'aide à sa façon. D'où l'importance de connaître vos besoins et de savoir formuler une demande. Acceptez, finalement, d'être dépossédée de tout cela: laissez-vous faire. Dans la quête spirituelle de l'humilité, c'est le sommet: lâcher prise. Cela revêt de nombreuses formes: supporter une maison désordonnée, changer d'attitude face au corps, gérer notre impatience (quand pourrais-je reprendre le sport ? ma vie d'avant ? avoir un corps que j'aime facilement ?), accepter la fatigue...
Deuxièmement, n'ayez pas peur d'être souple. Aujourd'hui, on nous parle beaucoup de "projet de naissance", de choix à faire. On se dit "Je veux accoucher sans péridurale", ou "Je veux allaiter", ou "Je veux reprendre le travail"... Or, cela ne se passe pas ainsi. Le lâcher prise va jusqu'à se remettre totalement entre les mains du Créateur, dans la confiance la pus totale, pour vivre chaque jour l'un après l'autre. Heure après heure. Minute après minute. Un choix n'est jamais irréversible, et l'humilité, c'est aussi accepter que l'on n'est pas capable. Un allaitement qui tourne au désastre et cause la déprime générale nous prouve qu'il vaut mieux une mère qui donne le biberon à son bébé et qui reprend courage et force plutôt qu'une mère qui pleure sans cesse et pour qui chaque tétée est un cauchemar (probablement pour le bébé et le mari aussi !). Renoncer à un allaitement qui se passe mal, prendre la péridurale alors que vous ne la vouliez pas, etc... ne feront pas de vous une mauvaise mère. Vous êtes la meilleure maman pour votre bébé. Vous obstiner, en revanche, pourra causer de nombreux dégâts... Cela s'applique à tous les sujets, au delà du post-partum.
Anticipez ce que vous pouvez anticiper !
A ce sujet, je ne peux que vous conseiller l'ouvrage de Julia Simon, naturopathe, "Bien vivre le quatrième trimestre au naturel": il regorge de conseils, d'astuces et de recettes, contient des listes à remplir par vos soins, des idées pour le séjour à la maternité et le retour à la maison. Une mine d'or !
Les maux physiques: vous savez que votre taux de fer est souvent bas ? Prévoyez-vous une petite cure après l'accouchement; renseignez-vous sur les symptômes de carences pour identifier un souci de ce côté-là ! Peur d'une déchirure, des hémorroïdes, ou de tout autre inconfort ? Il existe de nombreuses astuces pour soulager ces maux !
Les rendez-vous post-accouchement: votre accouchement approche ? Prenez déjà les rendez-vous médicaux importants dans les quinze jours qui suivent le terme: ostéopathe, conseillère en lactation... Une fois votre bébé dans vos bras, le temps passera vite et vous serez heureuse d'avoir été prévenante !
Cuisinez à l'avance: vous débutez votre neuvième mois de grossesse ? Aux fourneaux ! Faites le plein de bons fruits et légumes, de bons aliments, et concoctez-vous des petits plats en abondance. Louez un congélateur si besoin, et remplissez-le de petites douceurs saines. Le moment venu, nul besoin de vous atteler à la cuisine: vous sortirez de votre congélateur ce que vous aurez préparé avec amour. C'est bon pour le moral, et pour votre santé: exit les plats tout faits !
Faites signe à votre entourage: dressez une liste des personnes susceptibles de vous aider. Nom, numéro de téléphone: vous savez que vous pouvez compter sur ces gens. Voisins, amis, ou famille, faire cette liste vous permettra de vous sentir entourée et pourquoi pas de prévenir ces personnes à l'avance. Souvent, lorsqu'un ami ou un voisin nous propose ses services, on se dit qu'on verra le moment venu. Or, planifier ce genre de chose permet, une fois de plus, une plus grande sérénité pour tout le monde.
Elles sont nombreuses, les solutions pour vivre un post-partum serein. Il est beau, le chemin qui mène au ciel ! Il est particulièrement beau durant cette période du post-partum, où notre faiblesse est grande. La porte est alors ouverte pour Dieu.
« Mais se sentir plier sous le poids formidable
Des vies dont un beau jour on s'est fait responsable,
Savoir qu'on a des joies ou des pleurs dans ses mains,
Savoir qu'on est l'outil, qu'on est le lendemain,
Savoir qu'on est le chef, savoir qu'on est la source,
Aider une existence à continuer sa course,
Et pour cela se battre à s'en user le coeur...
Cette fatigue-là, Monsieur, c'est du bonheur. »
Robert Lamoureux, Eloge de la fatigue
Bibliographie:
"Bien vivre le quatrième trimestre au naturel", Julia Simon.
Cours sur les 4 tempéraments, Maryvonne Pierre.
Conférence sur les 4 tempéraments, Révérend John Brucciani.
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