La place des femmes dans l’histoire de l’Eglise
Lorsque l’on parle des pouvoirs qui entravent le libre épanouissement des femmes, l’Eglise Catholique est la première accusée. Son soi-disant anti-féminisme a toujours été critiqué. Pourtant, rappelons l’affirmation suivante d’André Malraux: « J’entends dire que la religion catholique est misogyne, ce n’est pas sérieux ! Une religion qui agenouille les hommes devant une femme couronnée manifeste une misogynie suspecte. »[1]
La femme a une place toute particulière dans la bible : dès l’Ancien Testament les femmes ont un rôle déterminant dans l’histoire du peuple d’Israël : on pense à Judith, Esther ou les femmes d’autres patriarches. Mais ces femmes ne font que précéder, celle qui sera la figure de la vocation féminine : la Vierge Marie. C’est d’ailleurs pour cela que Saint Jean Paul II a daté son encyclique Mulieris Dignitatem au 15 aout 1988, au cours de l’année mariale.
Le Christ a également réservé une place toute particulière aux femmes au cours de sa vie terrestre. Aucune femme ne reçut le sacerdoce, ni n’assista à la dernière Cène mais des grâces leurs ont été réservées. Marthe et Marie recevaient les confidences du Seigneur lors de ses arrêts à Béthanie. Marie Madeleine a reçu l’annonce de la Résurrection à l’époque où le témoignage des femmes était récusé comme celui des enfants, des esclaves et des infirmes. Elle a été proclamée « Apôtre des apôtres » et ce sont des Saintes Femmes qui entouraient le Christ au pied de la croix. Dès les temps apostoliques, des groupes de femmes ou de veuves se sont créés dans l’Eglise pour annoncer l’Evangile. [2] Le rôle des femmes dans la conversion des peuples à l’Evangile est d’ailleurs un des plus beaux aspects de l’histoire du Christianisme. Nulle part ailleurs leur réelle puissance et leur apparente faiblesse n’éclatent dans un contraste plus touchant.
La grâce toute particulière accordée à la Vierge Marie, Théotokos, c’est-à-dire mère de Dieu, révèle à quelle vocation Dieu appelle toute femme : accueillir le « Tout autre, Dieu ». Marie, Théotokos, est l’expression la plus accomplie de la dignité et de la vocation féminine. Marie en tant que femme et mère de Dieu, doit être la source essentielle de la réflexion sur la dignité et la vocation de la femme. [3] Elle indique la façon dont la femme doit concrétiser sa mission. Chaque femme est appelée à « imiter Marie », qui est, « par sa virginité, le pur archétype de la nature féminine »[4], en ce qu’elle est « celle qui est le plus intimement unie au christ » en ce qu’elle est « le cœur de l’Eglise dont le Christ est la Tête, et en ce qu’elle est celle qui a enfanté toute l’humanité en Christ »[5]. Chaque femme est, de ce fait, « appelée, dans le plus sublime et dans le plus pur déploiement de son être, à incarner l’essence même de l’Eglise, à être son symbole ». [6]
Dans son audience du 6 janvier 1995, Jean Paul II souligne certaines qualités de la Vierge Marie que la femme doit imiter. Parmi elles, il rappelle l’importance de la coopération de la femme à la venue du Christ, de conserver une l’attitude de service humble, de se rappeler la valeur de la maternité mais également de la virginité pour le Royaume et enfin, de rester engagé dans la charité.
Ainsi, dès les premiers siècles de son histoire, l’Eglise manifeste à l’égard des femmes, un triple souci : celui de sauvegarder leur dignité, de les faire accéder au savoir ainsi que de respecter le pouvoir qu’elles peuvent être amené à exercer,[7] afin d’exercer pleinement leur vocation féminine dans la société.
La création de la femme dans la Genèse
Tout comme l’homme, la femme a été créée à l’image et à la ressemblance de Dieu (Gn 1,27). Cette affirmation doit être la base de la réflexion anthropologique sur l’homme et la femme et confirme le caractère sacré de la vie humaine.
Dans le second récit de la création, la femme est créée à partir de la côte de l’homme. Appelée ainsi à l’existence, la femme est immédiatement reconnue par l’homme comme « chair de ma chair et os de mes os » (Gn 2, 23). C’est pour cela qu’elle est nommée dans le langage biblique, femme « isha » parce qu’elle est tirée de l’homme « ish- ».
Le livre de la Genèse affirme que l’unité du couple passe avant la distinction entre l’homme et la femme : « Homme et Femme, il les créa » (Gn 1,27). Ainsi, dans la création il n’y a pas l’homme d’une part et la femme d’autre part mais bien un couple indissociable qui constitue la base de l’unité originelle. La femme est créée à partir du côté d’Adam comme l’eau et le sang de la nouvelle Alliance ont jaillit de la côte du Christ, transpercée par la lance (Jn 19, 34).
L’apôtre Paul a souvent été qualifié de misogyne pourtant c’est lui qui a trouvé la plus belle formule que l’on puisse imaginer pour magnifier le rôle de la femme : « Elle est la gloire de l’Homme » (1 Co 11,7). Dans le langage biblique le terme gloire signifie ce qui donne du poids, de l’importance, de l’éclat.
D’emblée dans le livre de la Genèse, Eve est qualifiée de « mère des vivants » (Gn 3, 20) puis sur la croix, le Christ institue Marie, mère de l’Eglise. En définitive, le plan de Dieu dépend aussi de la femme, qu’il s’agisse de la faute originelle ou de la Rédemption. [8]
Péché originel : la femme est-elle vraiment à l’origine du mal ?
Tout vient de la première tentation de la femme par le démon qui lui souffle de se libérer. Il essaie de faire croire à la femme qu’elle est esclave de Dieu par cette obéissance demandée par lui. Cette tentation consiste à faire croire à la femme que son bonheur, n’est pas dans l’amour et l’obéissance à Dieu, qu’il n’est pas dans ce que Dieu a voulu pour elle, et il lui fait croire qu’elle est capable de connaître seule le bien et le mal.
Après la chute, Dieu dit serpent « Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta descendance et la sienne ; celle-ci te visera à la tête et tu la viseras au talon » (Gn 3, 15). La femme se trouve donc en première ligne (et non l’homme) dans cette bataille. La femme reste aujourd’hui au cœur des luttes pour la famille, parce qu’elle est justement l’âme de la famille. Non parce qu’elle serait plus faible que l’homme mais parce qu’elle détient un pouvoir sur le destin de l’humanité par ses capacités de persuasion et de séduction, et parce qu’elle détient les clés de la fécondité, de la génération, du don et de la vie. [9]
Dans la volonté de Dieu, la femme est vraiment celle qui est l’aide de l’homme. Il faut voir cela comme un rôle de complémentarité dans l’ordre de l’amour. Il s’agit pour elle d’éveiller l’homme à un véritable amour spirituel et de coopérer à la croissance de cet amour. La femme est donc source d’amour pour l’homme. Elle doit être celle qui doit éveiller à l’amour. Jo Croissant résume très bien cette vocation de la femme : « Elle doit toujours être aimante jusqu’à ce que l’amour soit réveillé dans le cœur de l’autre, c’est là sa vocation »[10]
De nombreux grands hommes de l’histoire ont eu des mères exceptionnelles, et eux-mêmes ont eu pourtant des fils insignifiants. Comment expliquer cela ? Ces femmes ont exercé leurs talents non pour elles-mêmes mais pour les transmettre, contrairement à l’homme qui se livre souvent tout entier dans l’exercice de ses talents. La femme est celle qui porte l’amour, celle qui en est la source et celle qui le garde. Elle porte d’ailleurs une alliance toute particulière avec Dieu, qui est méprisée par le démon, dans le mystère de la fécondité qu’elle vit en elle et qu’elle porte en elle. Elle est unie au mystère de la création divine.
[1] Malraux A, Entretien, Le point, 17 mars 1975 [2] Le Pivain D, La vocation féminine dans l’Eglise, Bulletin des amis de la Fraternité Saint Pierre, Janvier-Février 1997, n° 52 [3]Jean Paul II, Mulieris Dignitatem, 15 aout 1988 n°13 [4] Stein E, Les problèmes posés par l’éducation des jeunes filles, Conférences, p 337 [5] Stein E, La mission de la femme en tant que guide de la jeunesse sur le chemin de l’Eglise, Conférences p 388-389 [6] Ibid, p 389 [7] Perrachon A, Le féminisme, l’Eglise et les autres… , in Permanences n°156, Janvier 1959, pages 27-31 [8] Debray P, La femme dans le plan de Dieu, in Fiche d’éducation à la foi, supplément du courrier hebdomadaire, 1984, n°174 [9] Gillard-Chevallier P, « Les principes de la vie chrétienne : la vocation de la femme », in la Nef n°139 Juin 2003 [10] Croissant J, La femme sacerdotale, Ed des Béatitudes.
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