Voici le deuxième d'une série de quatre extraits de romans évoquant la fête de Noël. Ils m'ont permis, directement ou indirectement, de réfléchir et mieux cerner la spécificité de cette fête si importante à nos cœurs. Les histoires racontées, très différentes, font écho aux textes liturgiques dans une lecture à la fois personnelle et spirituelle.
Les textes du deuxième dimanche de l'Avent sont résolument tournés vers les plus humbles et les plus petits, qui crient leur détresse vers le Ciel où se trouve Celui qui les sauvera :
"Il délivrera le pauvre qui appelle
et le malheureux sans recours.
Il aura souci du faible et du pauvre,
du pauvre dont il sauve la vie."
(Psaume 71)
Pour cette semaine, j'ai choisi un extrait des Misérables, immense fresque littéraire publiée par Victor Hugo en 1862. Dans ce roman, on côtoie la pauvreté sous toutes ses formes. C'est dur, sans pitié, presque trop réaliste parfois. J'ai trouvé cette lecture vraiment éprouvante. Cependant des étincelles de lumière éclatent là où on ne les attend pas, et c'est un tel soulagement que l'on se prend à espérer !
Affiche d'époque, par Jules Chéret
Cette image provient de la Bibliothèque en ligne Gallica, Domaine public.
Voici l'une de ces pépites : un soir de Noël, le héros, Jean Valjean, ancien forçat évadé, loge dans la sinistre auberge Thénardier. C'est ici qu’habite la malheureuse Cosette, petite fille maltraitée et exploitée par les propriétaires qui sont de bien vilaines gens. Il s'attarde dans la salle commune...
L’homme se relevait et allait s’en aller lorsqu’il aperçut au fond, à l’écart, dans le coin le plus obscur de l’âtre, un autre objet. Il regarda, et reconnut un sabot, un affreux sabot de bois le plus grossier, à demi brisé et tout couvert de cendre et de boue desséchée. C’était le sabot de Cosette. Cosette, avec cette touchante confiance des enfants qui peut être trompée toujours sans se décourager jamais, avait mis, elle aussi, son sabot dans la cheminée. C’est une chose sublime et douce que l’espérance dans un enfant qui n’a jamais connu que le désespoir. Il n’y avait rien dans ce sabot. L’étranger fouilla dans son gilet, se courba et mit dans le sabot de Cosette un louis d’or. Puis il regagna sa chambre à pas de loup. |
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Dans ce passage extrêmement touchant, on voit le souhait de l'enfant exaucé presque miraculeusement par le passant. Cosette, contrairement à nous, n'avait pourtant ni la foi ni le réconfort des Ecritures :"Jamais, nous l'avons dit, elle n'avait su ce que c'est que prier, jamais elle n'avait mis le pied dans une église." Pourtant, par une grâce toute spéciale dans sa vie de malheur, il lui avait été donné d'espérer, et cette espérance n'a pas été déçue.
"Tout ce qui a été écrit à l'avance dans les livres saints
l’a été pour nous instruire,
afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures,
nous ayons l’espérance." (saint Paul aux Romains 15)
La figure de Jean Valjean est presque christique : lui le rejeté, le banni, s'abaisse encore pour rendre justice à celle qui est encore plus faible et persécutée. Ses malheurs ne lui ferment pas les yeux. Loin d'être endurci, il est encore plus sensible. Ce faisant, il lui rend la vie, car pour la première fois, elle est regardée comme une personne et aimée.
"Il jugera les petits avec justice ;
avec droiture, il se prononcera
en faveur des humbles du pays." (Isaïe 11)
La pauvre Cosette s'endort avec la belle poupée offerte par Jean Valjean.
(huile sur toile de Léon-François Comerre) — Travail personnel, Domaine public.
Cette semaine, prions pour tous ceux qui en ont besoin. Ouvrons nos yeux à la détresse de nos proches et essayons de déployer une charité inventive.
Les textes du deuxième dimanche sont disponibles sur AELF.
Merci pour votre article et le rappel de ce très bel extrait. On en veux encore :)