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Photo du rédacteurMarie D

"Trois jours et trois nuits"




Trois jours et trois nuits


C’est le temps qu’ils ont été invités à vivre entre les murs de l’abbaye de Lagrasse, dans l’Aude, au cœur du massif des Corbières.



Trois jours et trois nuits


C’est le temps qu’ils ont accepté de perdre – ou de donner… Le temps qu’ils ont mis à part dans leur agenda pour vivre une expérience : passer trois jours et trois nuits entre les murs d’une abbaye.



Trois jours et trois nuits, Le grand voyage des écrivains à l’abbaye de Lagrasse : 15 écrivains partagent leur expérience au lecteur. Tout simplement. Sans chercher à démontrer quoi que ce soit. Quinze écrivains partagent les lignes qui ont jailli de leur rencontre quelque peu incongrue : trois jours et trois nuits en clôture, dans l'intimité de quarante-deux chanoines en robe blanche.





Trois jours et trois nuits


Si peu de temps… Que peut-on prétendre percevoir de la vie de ces autres hommes qui ont choisi un jour de rester toute leur vie entre les murs d’une vieille bâtisse multi-séculaire ? Que peut-on oser décrire de cette vie, après seulement trois jours et trois nuits, quand les hommes qui habitent ces lieux vivent une expérience si décalée ?





Trois jours et trois nuits


Trois jours et trois nuits sans bruit, sans réseau – ah si ! : « Si vous voulez du réseau, vous devez aller dans la grande entrée. » (p 33)

Trois jours et trois nuits enfermé : « Je suis officiellement la personne la plus dingue du monde : j’ai accepté d’être confiné après le confinement », raconte Frédéric Beigbeder (p 121).

« Que l'on soit croyant ou non, arriver à Lagrasse pour quelques jours, partager la vie des frères, c'est subir une immersion instantanée dans une société aux antipodes de la nôtre : le silence en lieu et place du bruit, la frugalité plutôt que l'abondance, la coupure plutôt que la connexion. » (Pascal Bruckner, p 31)

Et ce n'est pas forcément facile...

« La première nuit dans mon petit lit à une place sous le grand christ, les "Confessions" de saint Augustin et une bouteille de whisky à mon chevet, j'ai cru que je ne tiendrai pas. » (Simon Liberati, p 299)




Trois jours et trois nuits


C’est si long !

Le Christ n’est-Il pas mort, et ressuscité le troisième jour ? Ce troisième jour ne se levait-il pas après de longues, très longues journées ? Quand la solitude et le silence nous assaillent, le temps s'étire...


« Où est le bruit ? Où est la vie ? Où sont mes tonitruants semblables ? » s'enquiert Jean-Paul Enthoven... (p 147)




Trois jours et trois nuits


Il peut s’en passer des choses, en trois jours et trois nuits…


C’est ce que nous offrent à voir ces écrivains qui ont accepté l’invitation à venir vivre entre les murs de l’abbaye de Lagrasse, au cœur d'une Communauté religieuse, dans le silence et la sobriété.



Parmi eux, des croyants peut-être, mais aussi des chercheurs, des agnostiques, des athées. Ils nous le disent, sans faux-fuyant.

« Je suis athée et je le regrette. Je ne le suis pas parce que je refuse Dieu, je le suis parce que je ne peux l’atteindre… » (Boualem Sansal, p 271)



C’est peut-être ce qui m’a le plus surprise (et séduite !) : cette propension à dévoiler en quelques pages (chaque écrivain nous offre entre 15 et 25 pages…) des questionnements intimes ; ce cadeau fait au lecteur de lignes teintées de curiosité intellectuelle et de bienveillance, sans tergiversation. Ici, personne ne cherche à convaincre personne. Les écrivains partagent simplement l’aventure qu’ils ont vécue au cœur de ces trois jours et trois nuits en livrant – pour certains – un peu d’eux-mêmes. Et plus qu’un séjour banal, c’est plutôt un voyage intérieur qu’ils décrivent avec des mots choisis. Un voyage intérieur, et l'expérience de la rencontre de deux mondes que tout semble séparer.


Ils nous donnent parfois de cheminer avec eux.

« Plus je réfléchis, plus j'ai du mal avec le Jardinier de Marie-Madeleine. Le Salut, c'est la foi, et la foi, c'est le Jardinier, quant à la foi du charbonnier, celle dont je me vantais au début, elle se dissipe dès que le charbonnier réfléchit trop au sujet du Jardinier. » (Simon Liberati, p 307)


Je ne savais pas ce qui m'attendait en ouvrant ces pages. J'y ai reçu des témoignages. Des témoignages de vie, humbles, vivants, légers et profonds à la fois.





Par leur contribution, les auteurs présentent un lieu, son histoire, et une Communauté d'hommes. Plus précisément, ils portent chacun leur regard personnel – marqué par leur propre culture, leur mode de vie, leurs références... – sur cette abbaye habitée.


L’œuvre est originale. Chaque écrivain répond à la demande avec ce qu'il est, si bien que chaque approche est différente. L'ensemble est facile à lire, dynamique, très accessible. Une aventure humaine, une expérience que l'on sent forte, inédite, nourrissante.



Au fil de la lecture, on rencontre quelques-uns des chanoines vivant à Lagrasse.

« Frère Jean-Marie a un visage parfait et des yeux d'ange. (...) Je l'interroge sur sa vocation. Il m'explique... » (Jean-Paul Enthoven, p 165)


On découvre l’aventure de cette Communauté religieuse dans des lieux investis en 2004.

« A la fin du siècle dernier, l’abbaye tombe entre les mains d’un millionnaire allemand fantasque (…) qui vit avec un chat, un fusil et un bulldozer. Son projet : transformer le lieu en hôtel, centre de yoga, médecines douces et Dieu sait quoi encore. En attendant, il casse tout : avec sa grosse pelleteuse, il démolit frénétiquement… » (Franz-Olivier Giesbert, p 191)


Et les frères de raconter à l’écrivain la suite…

« Le père Michel : "Chez nous, toutes les grandes décisions donnent lieu à un vote. Pour l’achat de Lagrasse, nous avons dit oui à l’unanimité et puis, après, on s’est regardés en se demandant si on n’était pas tous timbrés." » (p 192)


On savoure des pages d’Histoire aussi. On approfondit la spiritualité augustinienne.





Et on chemine avec ces écrivains…

Une lecture surprenante, vivifiante, nourrissante.


Trois jours et trois nuits, Le grand voyage des écrivains à l’abbaye de Lagrasse (Fayard et Julliard, 2021), 357 pages.

Les auteurs de ce livre reversent leurs droits aux chanoines de Lagrasse pour la restauration de leur abbaye.





Pour découvrir l'abbaye :


Pour en savoir plus sur les travaux de rénovation de l'abbaye de Lagrasse :



3 commentaires


Imago Calypso
Imago Calypso
26 juil. 2022

Bien aimé ce livre également, et cela donne envie d'aller à la rencontre des Frères.

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Sylvie B.
Sylvie B.
26 juil. 2022

Merci pour cette recension ! J'ai beaucoup aimé lire ce livre, on est surpris par la diversité des témoignages. A se demander s'ils sont tous allés au même endroit 🤔 Ce qui est sûr, c'est que la vie religieuse est un véritable trésor, dont on ne profite pas assez !

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Marie D
Marie D
26 juil. 2022
En réponse à

Merci ! J'ai beaucoup aimé le lire aussi. J'avoue admirer ce courage (ou cette humilité) des écrivains à dévoiler des choses si intimes... J'ai beaucoup apprécié le style plein de vie et de dynamisme de certains auteurs ! C'est parfois drôle de voir des mots mis sur cette expérience originale de passer du temps dans une abbaye, quand on n'est pas du tout habitué à ce rythme de vie !

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